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Page:Mendès - Les 73 journées de la Commune, 1871.djvu/147

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LES ENFANTS S’EN MÊLENT.

girard. Les ménagères du quartier sont là, gémissant et bavardant, cherchant qui un frère, qui un mari, qui un fils ; elles s’arrachent une lanterne blafarde qu’elles approchent des pâles visages, et parmi les cadavres, elles découvrent le corps d’une jeune femme littéralement criblé de balles. Quelle est donc la fureur qui emporte ces furies ? Savent-elles ce qu’elles font, comprennent-elles pourquoi elles meurent ? Hier, dans une boutique de la rue de Montreuil, entre une femme, le fusil sur l’épaule et du sang à la baïonnette. — Est-ce que vous ne feriez pas mieux de rester chez vous et de débarbouiller vos moutards ? lui dit une pacifique bourgeoise. De là une altercation furieuse ; la virago s’emporte à un tel point qu’elle saute sur son adversaire, la mord violemment au cou, puis, reculant de quelques pas, elle saisit son fusil et va faire feu, lorsque tout à coup, elle pâlit horriblement, laisse tomber son arme, et s’affaisse : elle était morte, la colère avait causé une rupture d’anévrisme. Telles sont à cette heure bien des femmes du peuple. 71 a les cantinières comme 93 a eu les tricoteuses ; mais les cantinières valent mieux, elles ont dans l’horrible une sorte de grandeur sauvage. Affreuses parce qu’elles combattent des Français, ces femmes, contre l’étranger, auraient été sublimes.

Les enfants eux-mêmes ne demeurent pas neutres dans cette épouvantable guerre. Les enfants ! dites-vous. Ne souriez pas. Un de mes amis vient de voir un pauvre petit garçon dont l’œil a été crevé par la pointe d’un clou. Voici ce qui s’est passé. C’était vendredi soir, dans la grande rue de Reuilly : deux cents gamins — les plus vieux avaient douze ans à peine — s’étaient réunis