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Page:Mendès - Les 73 journées de la Commune, 1871.djvu/187

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LA BOURSE PENDANT LA COMMUNE.

toutes les choses sublunaires dont je m’occupe peu, la Bourse est précisément celle dont je m’occupe le moins. Je suis un de ces niais excessifs qui ignorent absolument ce que peuvent faire pendant trois heures, chaque jour, — hommes noirs allant et venant sous la colonnade du « temple de Plutus. » Je savais parfaitement qu’il existait des agents de change et des coulissiers ; mais si l’on m’avait demandé ce que c’est que des coulissiers et des agents de change, j’aurais été incapable de répondre un seul mot. Nous avons tous de ces ignorances spéciales. J’avais, il est vrai, entendu parler de la Corbeille ; mais je m’imaginais ingénument que cette fameuse corbeille, faite d’osier tressé, contenait un fouillis odorant de feuilles et de fleurs, et que les gens de bourse, galants comme il convient à des Français, passaient le temps autour d’elle à composer des bouquets emblématiques qu’ils offraient ensuite à leurs belles amies. Combien je me trompais ! Un ami m’a désabusé, et quand j’ai été éclairé, tant bien que mal, sur ce qu’on faisait autrefois à la Bourse, je suis allé voir ce qu’on y fait aujourd’hui.

Je dois reconnaître d’abord que tout à l’heure, en employant cette vieille métaphore : « le temple de Plutus, » je ne savais pas ce que je disais. La Bourse n’est pas un temple ; si elle était un temple, elle serait une église, ou à peu près, et par conséquent, il y a longtemps qu’elle aurait été fermée par ordre de notre gracieuse souveraine, la Commune de Paris.

Donc elle est ouverte ; mais à quoi bon ? les personnes qui la hantent aujourd’hui auraient bien su y entrer malgré les portes bourrues et les grilles discourtoises ; car on sait que les spectres, les fantômes et autres êtres