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Page:Mendès - Les 73 journées de la Commune, 1871.djvu/73

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LES PREMIERS DÉCRETS.

Sur l’estrade, les membres du Comité ont pris place ; ils portent l’écharpe tricolore. L’un d’eux proclame les noms des conseillers élus.

Alors le canon retentit encore, scandant l’épouvantable voix joyeuse de la foule, qui fait trembler les vitres et remplit tout l’espace.

Ah ! peuple de Paris ! toi, qui, le jour de la « crosse en l’air, » t’enivrais dans les cabarets de Montmartre, toi qui as fourni les assassins de Thomas et de Lecomte, toi qui, rue de la Paix, as fusillé les passants, peuple extraordinaire, exécrable souvent, combien tu sais aussi, dans tes jours de magnificence, être puissamment beau, et quel volcan de passions généreuses brûle donc en toi pour que parfois, à ton approche, les cœurs même de ceux qui te condamnent se sentent dévorés et purifiés par tes flammes !

XXI.

« Citoyens, dit le Journal officiel de Paris, votre Commune est constituée. » Et, immédiatement, décrets sur décrets. Aimez-vous les affiches blanches ? on en a mis partout. Car, que faire à l’Hôtel de Ville, à moins que l’on ne décrète ?

La conscription est abolie. On ne verra plus, leurs numéros à leurs casquettes, s’en revenir par la ville ces pauvres jeunes gens ivres du patriotisme qu’ils avaient bu dans les débits de liqueurs. Plus de soldats ! En revanche, nous serons tous gardes nationaux. Voilà un glorieux décret ! comme dit Edgar Poë.