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LES OISEAUX BLEUS

ne cessait de se lamenter ; non pas seulement parce qu’on l’avait éloignée de ses compagnes avec qui c’était son plaisir de jouer aux tables ou d’aller, le tiercelet au gant, chasser la perdrix ou le héron, mais parce qu’elle était séparée d’un joli page de guerre, appelé Aymeri, boucles blondes et les joues si roses, à qui elle avait donné son cœur, pour ne jamais le reprendre.

De son côté, Aymeri n’avait pas l’âme moins désolée, et, une fois, accoudé à la fenêtre de la geôle où on l’avait enfermé, baissant la tête vers le précipice pierreux qui entourait la prison, il prononça tristement ces paroles :

— Que me sert-il de vivre, puisqu’on m’a dérobé celle qui était l’unique bonheur de ma vie ? Lorsqu’il m’était permis d’être auprès d’elle, je me plaisais à espérer de longs jours pleins de nobles combats et d’aventures victorieuses ; j’enviais toutes les gloires, que je lui aurais offertes comme un berger qui revient de la plaine donne à son amie un bouquet de fleurs des champs ; je voulais être illustre pour qu’elle m’en récompensât d’un sourire. Mais,