Page:Mendès - Les Oiseaux bleus, 1888.djvu/270

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
255
LA BELLE AU CŒUR DE NEIGE

qui avaient défendu l’honneur des dames dans les plus périlleux combats, de jeunes pages aussi, tremblants, roses de pudeur, dont la lèvre frémissait dans l’espérance d’un baiser. Mais la Belle au cœur de neige :

— Que veulent tous ces gens-là ? Qu’on les prie de sortir ; je ne saurais endurer plus longtemps leur bavardage, et j’ai hâte d’être seule pour me regarder dans mon miroir.

— Ah ! ma fille, ma fille, dit la nourrice, crains d’irriter les bonnes fées !

Alors s’avança un rustaud, très hideux de sa personne, contrefait, boiteux à cause du poids de sa bosse. Les courtisans, qui étaient au pied du trône, voulurent l’écarter, se moquant de ce paysan qui se mêlait de prétendre à la main d’une royale personne. Lui, cependant, continua d’approcher, et, d’une baguette qu’il avait dans la main, toucha le corsage de l’indifférente enfant. « Ah ! que je l’aime ! » s’écria-t-elle, sentant tout son être s’allumer et fondre en tendresse. Vous pensez l’émoi qui s’ensuivit ! Mais un roi n’a que sa parole ; le père de la princesse dut la laisser aller avec le méchant