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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/178

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MÉPHISTOPHÉLA

du bas, le pied s’effilait si mignon. Il ressemblait à une petite colombe posée là, qui aurait clos les ailes. Sophie déboutonnait l’autre bottine. Elle avait les doigts un peu tremblants de quelqu’un qui caresse une oiselle ou une fleur, et l’ose à peine toucher de peur de la froisser.

— Maintenant, dit Emmeline en pouffant de rire, puisque tu es ma femme de chambre, enlève mes bas.

Si elle avait regardé son amie, elle aurait frémi, tant Sophie, les lèvres battantes, était blême !

— Mais dépêche-toi donc ! Est-ce pour aujourd’hui ?

Sophie, ses mains crispées par le désir et la peur de la peau qui, tout à coup rencontrée, l’eût rendue folle, cherchait sous la jupe, — ses yeux trop chauds lui faisaient mal, — le nœud de la jarretière. L’un de ses ongles effleura la chair. Elle s’écarta très vite, se releva.

— Non, toi, toi-même, je suis trop maladroite. Emmeline haussait les épaules.

— C’est vrai que tu es maladroite, oui.

Et, très vite, elle fit glisser ses bas qu’elle jeta derrière elle. Ses deux petits pieds nus étaient dans le ruisselet, l’orteil à la pointe d’un caillou. L’eau froufroutait autour d’eux, passait par des-