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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/25

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MÉPHISTOPHÉLA

trageant triomphe, ce qu’il peut y avoir d’admiration dans le mépris. Faustine, Isabeau, Lucrèce ont connu à ce point la gloire de l’injure.

Après avoir tourné dans la rue Marbeuf, la voiture ralentit son mouvement devant un hôtel très vaste, ni grille, ni jardin, rien que de la pierre blanche, où s’ouvrent trois hautes voûtes, froides, sans sculptures ; s’engage en le plus large de ces tunnels pâles, et s’arrête. La baronne descend, une main sur le coude du valet. Elle a des mouvements nets, mesurés, précis, qui font penser à ce qu’il y aurait de statique réalisée dans un parfait automate ; elle monte un escalier, marches de marbre entre des plantes grasses, ne répond que d’un geste qui écarte aux deux femmes de chambre empressées sur le palier du premier étage, soulève une tenture qui retombe pesamment derrière elle, traverse un salon, un autre salon, une chambre, — luxes durs et clairs, d’étoffes blanches, très lisses, avec des rosaces d’acier, de meubles carrés, incrustés d’étain, de glaces sans nombre où se multiplient et s’infinissent les reflets des pâleurs brutales et des formes précises, ― arrive dans un cabinet tout d’albâtre brut et de faïence nue, spacieux, sans fanfreluches ni parfums, où les mille objets de toilette, argent mat, ivoires neufs, imitent, sur