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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/292

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MÉPHISTOPHÉLA

meil secoué de cauchemars, avec des grincements de dents quelquefois sous les lèvres rebroussées. Un bruit de porte qu’on ferme l’éveilla en sursaut. « D’où viens-tu, malheureuse ! » Mais Magalo déjà s’était jetée vers elle et pleurait à chaudes larmes sur l’épaule de Sophor.

— Ah ! ne me gronde pas, ne me gronde pas, je t’en prie ! Je te jure que je n’ai rien fait de mal. Je ne pouvais pas te dire où j’allais, parce que tu m’aurais empêché d’y aller. Tu as peut-être cru que j’étais avec des hommes ou chez des femmes ? Ah ! que tu es folle, je t’aime tant. Je te dis que je n’ai rien fait de mal. Ne me gronde pas, mon bébé !

Alors, l’autre, en la repoussant :

— D’où viens-tu ?

— Je n’ai rien à te cacher, je te raconterai tout. Je voyais bien, depuis longtemps, que tu pensais à la petite, à la petite de l’île. Tu l’aimes toujours. Je ne t’en veux pas. Tu as dû remarquer que je ne t’en voulais pas. Je comprends les choses, va, et je ne me fais pas illusion. Moi, si tu m’as, c’est pour le plaisir. Elle, c’est autre chose. Enfin tu étais triste parce que tu n’avais pas de ses nouvelles, parce que tu ne pouvais aller en chercher à cause de ta mère, et de ton mari, qui t’auraient gardée. Alors, ce que tu ne pouvais pas faire, je l’ai fait.