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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/318

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MÉPHISTOPHÉLA

plus ennuyeux était fait maintenant, qu’il n’y avait plus à s’inquiéter. À la vérité, elle avait le cœur un peu gros, parce que, sur l’ordre exprès de la jeune mère, une femme qu’on avait fait venir du bureau des nourrices, avait emporté la fillette, très loin, en Touraine. Tous les jolis plans dérangés ! elles ne se promèneraient pas avec la petite, mamans toutes les deux. Au moins, Sophor aurait dû lui parler ; on ne peut pas vivre, pourtant, sans causer ensemble. Mais Mme d’Hermelinge gardait son inerte attitude, ne sortait pas de son silence, presque toujours avait l’air de dormir. À quoi songeait-elle, en la solitude muette où elle s’internait ? Elle avait peut-être pris une résolution qu’elle accomplirait, le moment venu, de laquelle elle ne voulait pas se laisser distraire. Elle acceptait les soins sans y prendre garde, ne répondait pas même d’un signe à ces paroles : « Tu vas bien ? Tu ne souffres pas ? Tu as tout ce qu’il te faut ? » Si, rarement, elle levait les paupières, elle montrait des prunelles fixes qui ne voient rien de ce qui est là, qui regardent un but, au loin. Puis, très vite, elle refermait les yeux, comme avec une volonté de voiler sa pensée.

Le vingtième jour, comme Magalo rentrait dans la chambre, une tasse de bouillon entre les