Aller au contenu

Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/406

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
396
MÉPHISTOPHÉLA

les violentes usurpations après les premiers occupants pourchassés et dispersés. Il est plus hautain d’édifier sur des renversements.

La femme de chambre reparut.

Mme Nordrecht est là, avec Mlle Luce Lucy.

— Qu’on se mette à table, je viens.

D’ailleurs, licite ou défendu, glorieux ou vil, ce n’était pas elle qui avait mis en elle le furieux et triomphant désir dont s’alarmaient les consciences. Avec la morgue des héroïnes espagnoles : « Je suis celle que je suis ! » pensait-elle ; mais elle ne s’était pas faite ce qu’elle était. L’incendie a pour excuse l’étincelle qui l’alluma ; elle s’était développée fatalement, comme une fleur s’épanouit. C’est le semeur, non le champ, qui est responsable de la graine. Des femmes consentent aux paisibles hymens, acceptent l’humilité d’être épouses et la bestialité d’être mères. Elle n’était pas de celles-là ! Mais, monstrueuse, du moins au jugement social, elle n’inventa point sa monstruosité ; tout au plus était-elle complice de ses propres fautes, — des fautes, soit ! — puisqu’elle avait reçu l’ordre irrésistible de les commettre. Elle s’enorgueillissait d’obéir à une étrange loi, mais enfin, elle obéissait, elle était la servante, éperdument zélée, d’une toute-puissance ; heureuse de son