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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/426

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MÉPHISTOPHÉLA

— Je te dis que tu penses à une femme ! Ah ! ça, est-ce que tu crois que je ne m’aperçois de rien, que je suis idiote, que je ne sais pas que, depuis longtemps, tu as une personne en tête ? une personne qui n’est pas moi. Ça saute aux yeux que tu n’es plus la même. Quand je te parle, tu ne réponds pas ; et si, après avoir fait semblant de ne pas te regarder, je me tourne très vite, tes yeux sont ailleurs, loin de moi. Tu voudrais que je ne te regarde jamais pour ne pas être obligée de me regarder quelquefois, par politesse. Et puis, à d’autres signes, je vois bien que tu ne m’aimes plus comme autrefois. Il y a trois semaines que tu n’es pas venue dans ma loge ! ni au foyer. Je suis obligée de te chercher à présent, de venir ici sans que tu m’y conduises ; et si tu supposes que je n’ai pas vu ton air lorsque, tout à l’heure, après le dîner, mon cocher est monté pour prendre les ordres et que je lui ai dit : « Non, pas ce soir, demain, à midi. » Avoue que tu aurais voulu que je parte ! avoue que tu ne m’aimes plus, mais voyons, parle, je le veux, avoue !

Elle s’était piètée devant Sophor, la regardait en face, des rages dans les yeux. Mme d’Hermelinge, avec un air de plus grande lassitude :

— Tu es folle, tu sais bien que je t’aime ;