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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/48

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MÉPHISTOPHÉLA

Soudain, vers le soir, la rigidité du petit corps sans se détendre tressaillit, et Sophie, avec des claquements de dents, sursauta ! Voici que, les membres tordus, elle se roulait dans les draps, puis se cambrait toute jusqu’en un demi-cercle presque parfait ; ne touchant le lit que de la tête et des talons. Et, pendant que les servantes s’efforçaient de la maintenir, en pleurant de pitié et aussi avec un peu de cette épouvante que l’on aurait devant les gesticulations d’une possédée, elle, la face convulsée, les yeux écarquillés et secs, elle proférait cent paroles : « Emmeline… jamais plus… poupées… dans le jardin, toutes les deux… le hamac… petit mari, petite femme… jamais plus… » Elle parlait aussi d’un bruit, d’un bourdonnement, d’une espèce de rire, qui lui faisait du mal ; très souvent elle se plaignait de l’entendre, et des deux mains elle se bouchait les oreilles ; mais elle ôtait très vite ses mains, comme si, les oreilles closes, elle l’avait mieux encore entendu, ce rire. Enfin, vers le lever du jour, elle fondit en larmes, avec la soudaineté d’une rupture d’écluse ; et, après de longs sanglots, elle parut calmée, pourtant elle ne dormait pas.

Cette journée et la nuit suivante, et le jour d’après, elle ne souffrit pas ou du moins ne