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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/510

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MÉPHISTOPHÉLA

qui leur promit l’infini leur ouvre un espace à peine plus grand que la fosse où ils seront couchés tout à l’heure avec leurs mauvais désirs devenus vers de terre. C’est bien la peine de ne pas être sains, bons, chastes, de renoncer ici-bas à la conscience paisible et au paradis, là-haut, cette conscience devenue ciel, si l’on ne doit obtenir en échange, d’abord, que de douteux plaisirs toujours les mêmes, et, plus tard, que l’écœurement de les avoir obtenus, avec l’impossibilité d’en conquérir d’autres. On donne son âme, et l’on reçoit — si peu de chose. Pas même peu de chose : rien ! Cependant, sombrement éblouie encore par la vision de Celle qui s’érigeait, sur le trône sabbatique, avec un diadème de diamants noirs, Sophor n’osait pas blasphémer la Démone qui l’élut et l’épousa ; elle se refusait à confesser qu’il n’y a pas de mystères où l’être revit, s’exaspère, ne défaille que pour s’exaspérer encore, et se divinise épouvantablement ! En somme, elle n’avait connu que les douceurs bientôt fades des baisers ; même dans les plus orgiaques outrances, elle n’avait convoité que d’agréables ivresses. Elle n’avait pas tenté la douleur, n’avait pas essayé de demander la joie aux supplices ! C’était peut-être grâce à la souffrance qu’elle cesserait de