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Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/133

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d’autrui. Jamais l’ame de Socrate ou de Marc-Aurele ne rencontrera celle de Néron : elles seront toujours à une distance infinie. Voila ce que nous osons assurer. Mais ce n’est point à nous à mesurer les poids qui entreront dans la balance éternelle. Nous croyons que les fautes qui n’ont pas entierement obscurci l’entendement humain, que le cœur qui ne s’est point avili jusqu’à l’insensibilité, que les rois mêmes qui ne se sont pas crus des Dieux, pourront se purifier en améliorant leur espece pendant une longue suite d’années. Ils descendront dans des globes où le mal physique prédominant sera le fouet utile qui leur fera sentir leur dépendance, le besoin qu’ils ont de clémence, & rectifiera les prestiges de leur orgueil. S’ils s’humilient sous la main qui les châtie, s’ils suivent les lumières de la raison pour se soumettre, s’ils reconnoissent combien ils sont éloignés de l’état où ils pourroient parvenir s’ils font quelques efforts pour y arriver, alors leur pélérinage sera infiniment abrégé ; ils mourront à la fleur de leur âge : on les pleurera ; tandis que souriant en abandonnant ce triste globe, ils gémiront sur le sort de ceux qui doivent rester après eux sur une planette malheureuse dont ils sont délivrés. Ainsi tel qui craint la mort, ne sait ce qu’il craint ; ses terreurs sont filles de son ignorance, & cette ignorance est la premiere punition de ses fautes.