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Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/365

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détails de la vie domestique : quand je les tiens une fois, je n’ai pas besoin de savoir le reste ; je le devine.

D’abord je ne trouvois plus de ces petits appartemens qui semblent des loges de fous, dont les murailles ont à peine six pouces d’épaisseur, & où on est gelé l’hiver & brûlé l’été. C’étoient de grandes salles vastes, sonores où l’on pouvoit se promener ; & les toits munis d’une bonne charpente défioient les traits piquans de la froidure & les rayons du soleil : les maisons enfin ne vieillissoient plus avec ceux qui les avoient fait bâtir.

J’entrai dans le sallon, & je distinguai à l’instant le maître du logis. Il vint à moi sans grimace & sans fadeur[1]. Sa femme, ses enfans avoient en sa présence une contenance libre, mais respectueuse ; & le Monsieur, ou le fils de la maison, ne commença point par persifler son père pour me donner un échantillon de son esprit : sa mère & même sa grand’mère n’auroient point applaudi à de

  1. Que notre politesse est fausse & minutieuse ! que celle dont se parent les grands est odieuse & insultante ! C’est un masque plus hideux que le visage le plus difforme. Toutes ces révérences, ces affectations, ces gestes outrés sont insupportables à l’homme vrai. La brillante fausseté de nos manières est plus détestable que la grossiéreté des hommes les plus rustiques n’est rebutante.