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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/232

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CHAPITRE LII

La Vie Nouvelle



Les souvenirs de Pélasge l’attiraient souvent dans l’avenue de l’ancienne habitation Saint-Ybars. Il aimait à s’y revoir entrant pour la première fois, avec Chant-d’Oisel alors charmante fillette à physionomie douce et réfléchie. Il repassait en esprit les meilleurs jours qu’il avait connus, sur cette habitation où devait s’écouler une partie si importante de son existence. Tous les jours, depuis quelque temps, il sortait de la ferme, au coucher du soleil, traversait la savane blanche ça et là par les ossements des animaux tués pendant la guerre, et allait s’asseoir dans l’avenue, sur un chêne déraciné, à une petite distance du fleuve. De là il voyait passer les voitures sur la voie publique, et plus loin les bateaux qui montaient ou descendaient. Il les regardait avec indifférence, ou plutôt il ne les regardait pas ; c’étaient comme des ombres confuses qui glissaient devant ses yeux.

Un samedi, Pélasge était assis dans l’avenue, à sa place accoutumée, la tête appuyée sur sa main. Il avait ôté son chapeau, pour mieux sentir la brise du Sud qui lui arrivait toute fraîche du fleuve ; ses cheveux noirs parmi lesquels serpentaient quelques fils d’argent, s’agitaient dans le tourbillon du vent. Il était plongé dans une de ces méditations sur l’avenir de l’humanité, dans lesquelles il trouvait un refuge contre l’ennui depuis qu’il avait perdu le goût des livres. Une voiture arrêtée à l’entrée de l’avenue, attira forcément son attention : un jeune