Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/10

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pillage et que, les joignant à ses articles déjà parus, il composa cette série de chroniques éloquentes et sincères qu’il intitula Nouveau Paris.

Sincères, disons-nous. Le mot est juste, bien que le public pût s’étonner de certaines virevoltes dans l’esprit de l’auteur, de ses changements d’idées, de ses contradictions avec lui-même. Mais l’effervescence dans laquelle il lui fallait vivre, ses craintes, qu’il ne dissimule pas, de marcher un jour, lui aussi, vers l’échafaud, l’emprisonnement qu’il subit pendant plus d’une année (17 vendémiaire, an II, au 3 brumaire, an III) où, transporté de prisons en prisons, il n’eut plus de contact journalier avec les événements et les hommes, ne sont-ils pas des excuses à sa versatilité et à ses démentis involontaires ?

Il l’avoue lui-même : « Je ressemble, dit-il, au sicambre Clovis, je suis tenté de brûler ce que j’ai adoré et d’adorer ce que j’ai brûlé. » Et, en effet, il nous le prouve si nous remarquons qu’après avoir flétri les loteries royales, il devient contrôleur des loteries républicaines ; si nous considérons qu’il célèbre le 10 août comme un triomphe populaire, alors qu’il n’était que celui de la Gironde et de la Montagne obéissant aux ordres de Pitt, de même, en 1797, il fêtera Bonaparte, le saluera comme le maître indiqué et, plus tard, s’élèvera contre ce sabre organisé et ne souhaitera que sa chute.

Mais, si les opinions personnelles de l’homme sont changeantes, si ses points de vue diffèrent selon les incidents et les pouvoirs, ce qui, pour nous, demeure du plus haut intérêt ce sont ses études générales et le rôle de journaliste au jour le jour qu’il a tenu.

Et c’est là surtout ce que nous avons respecté dans l’édition actuelle, croyant être plus utile à nos lecteurs en leur donnant les comptes rendus d’un témoin consciencieux que les articles philosophiques ou fantaisistes d’un écrivain merveilleusement doué, mais chimérique parfois.


L. R.