Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/118

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saires à la vie, et joindre à ces attentats l’ironie la plus sanglante.

Et quand je me rappelle les acclamations des tribunes, Henriot le chapeau sur la tête, et l’insolence sur le front, criant que le peuple souverain était debout, et qu’il venait dicter ses lois, et qu’Hébert, son second et son imitateur, obtint dans la suite les mêmes satellites et en aussi grand nombre ; oh ! si j’avais eu le malheur de nourrir quelques idées démagogiques, je les aurais perdues à cet épouvantable tableau ; car j’ai pour longtemps dans la mémoire ces physionomies de scélérats, tous vociférateurs, qui concordaient si bien avec celles de Couthon et de Robespierre.

Hébert s’imaginait avoir hérité du secret de ranger toute une Convention sous le joug de quelques oppresseurs, de dresser pour son compte la hache décemvirale, et de punir de mort un geste, un soupir, une parole. Il avait créé aussi des expressions magiques, et il eut dans les tribunes de l’Hôtel de ville ses portefaix, ses tricoteuses, ses hordes, ses pétitionnaires. Enfin, il allait achever le spectacle de l’anarchie la plus complète, si d’autres démagogues n’eussent vu en lui un rival qu’il fallait écarter en l’envoyant au supplice.

La puissance colossale de la commune ne s’en éleva pas moins progressivement jusqu’à la journée du 9 Thermidor.

Marat, par l’immense popularité que lui avait acquise sa feuille sanguinaire, fut le père de toutes les horreurs qui suivirent son affreux règne. Ô gouvernement ! sois fort pour être juste, parce que tu n’es pas sûr en étant juste d’être fort !


CONDORCET



Comme la mort de Condorcet[1] a causé une sensation universelle, on s’est empressé d’en savoir les particularités. Voici ce qu’un témoin oculaire m’a transmis. Arrêté à

  1. 7 avril 1794.