Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/121

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Convention nationale, de son propre aveu n’a laissé échapper que les vertus et les actions qui auraient pu appartenir à un Socrate, à un Platon, à un Penn ; car eux-mêmes auraient été forcés, ou se seraient condamnés au silence, au milieu de cette épouvantable détonation, propre à tuer et le génie et la voix de la philosophie, et celle du bon sens. Que pouvait alors la raison humaine ? Rien.

On peut lui reprocher cependant de n’avoir émis dans le procès de Louis XVI qu’une opinion si indécise, si contournée, si embarrassée, que chacun s’écria tout haut que le philosophe avait parlé en véritable enfant.

Condorcet, Lavoisier, n’ont pu trouver une cache ; le dernier des Brutus s’est écrié : Vertu ! tu n’es qu’un vain nom ! ces deux hommes célèbres pouvaient adresser à l’amitié la même mémorable apostrophe.


FÊTE À L’ÊTRE SUPRÊME[1]



Ces fêtes de la Raison avaient déplu à Robespierre, parce qu’il n’en était pas l’inventeur ; d’ailleurs, un cri sourd d’indignation s’élevait contre ce mélange d’idolâtrie et d’athéisme, dont on voulait composer une religion nouvelle.

Robespierre en fut jaloux, c’était un misérable avocat de sept heures[2] ; ce qu’il avait lu, il l’avait mal lu. Il crut qu’il pouvait jouer le rôle de Mahomet, et réintégrer l’Être Suprême dans tous ses droits. Il avait beau jeu, après les lupercales, après les parades infâmes que de misérables charlatans avaient fait jouer à Paris et dans les

  1. 8 Juin 1794 (20 prairial an II).
  2. On appelait de ce nom au Palais des procureurs renforcés, qui, sous le nom d’avocats, n’avaient qu’une facilité parlière et vide de sens et qui ne tarissaient point en phrases. (Note de Mercier.)