BONAPARTE À LA SÉANCE PUBLIQUE DE L’INSTITUT NATIONAL, LE 15 NIVÔSE AN VI[1]
h ! qu’elle était intéressante, cette assemblée d’hommes
connus et distingués, de savants en différents genres,
au milieu desquels siégea Bonaparte ! Elle resplendissait
ce jour-là de toute la gloire du héros : en vain essaya-t-il
de tromper les regards des spectateurs, sous l’habit du
plus simple particulier ! c’était lui seul qu’ils cherchaient,
et c’était la joie de le posséder que l’on trouvait dans les
yeux même des hommes illustres qui étaient en sa présence.
Quel calme régnait dans les traits du conquérant de l’Italie ! on craignait, pour ainsi dire, d’interrompre sa méditation et le repos de son âme. Ce n’étaient plus les sons éclatants de la trompette qui annonce le signal du combat ; une muse en pleurs, jetant des fleurs sur la tombe du pacificateur de la Vendée, moissonné au printemps de la vie, parlait à l’Achille français de son digne et valeureux ami[2] : voilà le sort des guerriers, la mort et la gloire ! et comme ils offrent à la patrie les sacrifices les plus étendus, leur renommée est la plus grande et la plus belle !
De beaux vers, bien récités, firent à peu près dans les âmes la même impression que le bruit du canon, dans les batailles, opère sur les guerriers : tous les esprits s’enflammèrent, et tout le monde se leva à celui-ci.
L’Angleterre pâlit au seul nom l’Italique !
On applaudit encore à cet autre vers où, en parlant de nos jeunes héros, vieux dans l’art des combats, le poète s’est écrié dans un accent prophétique :
Ils franchirent les monts, ils franchiront les mers !