Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/40

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mille livres. » Or la paye du soldat remontait, tout au plus, à six sols par jour ; donc les chiens de sa majesté étaient mieux traités que les soldats qui versaient leur sang pour défendre, ce qu’elle appelait ses droits. Il n’y a pas un militaire qui n’ait pu dire qu’il voudrait bien être traité comme un chien.


RENVOI DE M. NECKER

Le livre des grands événements par les petites causes n’est pas encore seulement commencé, et c’est parce que je l’ai longtemps médité que je ne vais pas chercher bien loin ce qui a engendré un fait quelconque, lorsque le jour d’hier est quelquefois son véritable générateur.

Les ordres privilégiés qui avaient bien voulu par condescendance n’employer que la mauvaise foi, la ruse, et quelques petites menées pour répandre dans les provinces la division, la disette, et même la famine, et opérer la dissolution de l’Assemblée nationale, voyant qu’elle se familiarisait jusqu’à vouloir établir les droits de l’homme, résolurent d’associer le plaisir de la vengeance avec l’orgueil de l’empire, d’en imposer tout à la fois à la capitale et de braver l’armée entière. Ils traitèrent de bourgeois six cents pauvres députés presque écrasés sous le poids de la calamité nationale, et tout étonnés que le tiers état ne fût point disposé à endurer les humiliations qu’on lui avait fait tant de fois essuyer dans les assemblées des règnes antérieurs, ils décrétèrent dans leur comité secret que le ministre des finances serait chassé avec éclat ; qu’on se rendrait maître de Paris et de cette bourgeoisie assemblée ; que, s’il s’y trouvait des mutins, ils seraient dispersés, n’importe comment ; enfin que les mots d’états généraux, d’Assemblée nationale seraient désormais effacés de tous les dictionnaires français. 25 à 30.000 hommes à cheval et à pied eurent ordre de se rendre aux environs de Paris et de Versailles ; mais était-on bien sûr des mili-