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Page:Mercier - Néologie, 1801, tome II.djvu/96

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ciation des mots qui la composent. Admettre dans la Langue française parlée, des voix brèves, très-brèves, muettes ; fermées, très-fermées, sourdes ; ouvertes, plus ouvertes, très-ouvertes, ce serait la rendre si difficile, que ceux-là mêmes qui établiraient des règles aussi absurdes, ne pourraient pas les suivre exactement en parlant. Les langues sont pour les peuples, et non les peuples pour les langues. (Xavier Tisserand.)

Langue. Je blâme cette noblesse prétendue qui nous fait exclure de notre langue un grand nombre d’expressions énergiques. Les Grecs, les Latins, qui ne connaissaient guères cette fausse délicatesse, disaient en leur Langue ce qu’ils voulaient, et comme ils le voulaient. Pour nous, à force de raffiner, nous avons appauvri la nôtre ; et n’ayant souvent qu’un terme propre à rendre une idée, nous aimons mieux affaiblir l’idée, que de ne pas employer un terme noble. Quelle perte pour ceux d’entre nos écrivains qui ont l’imagination forte, que celle de tant de mots que nous revoyons avec plaisir dans Amyot et dans Montaigne ! Ils ont commencé par être rejetés du beau style, parce qu’ils avaient passé dans le peuple ; et ensuite, rebutés par le peuple même, qui, à la longue, est toujours le singe des grands, ils sont devenus tout-à-fait inusités. Je ne doute point que nous n’ayons bientôt, comme les Chinois, la Langue parlée et la Langue écrite. (Diderot.)