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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome III, 1782.djvu/163

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avoir ameuté les esprits, finissent par les entraîner.

Mais malheur à celle qui n’est pas mariée ! rien ne lui est permis, on lui fait un crime de tout. Les meres sont d’autant plus vigilantes qu’elles connoissent tous les tours que les passions peuvent inspirer. Ainsi le rôle de fille est le plus cruel rôle du monde. On la dresse à tous les rians atours de la mignardise & de la coquetterie ; on ne lui imprime que l’amour des arts qui servent & embellissent la volupté ; on ne lui impose d’autre devoir que la science de plaire : & l’on veut que, renonçant au but de tant d’instructions, elle soit froide, sourde à tous les propos qui circulent autour d’elle, & qu’elle demeure même insensible au plaisir qui naît de l’impression de ses charmes.

Il faut donc qu’elle dissimule avec un cœur neuf, & qui ne sembloit pas né pour soutenir le rôle d’une feinte perpétuelle. Elle ne peut jamais dire un mot de ce qu’elle sent si bien ; le monde devient injuste & absurde