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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IX, 1788.djvu/298

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du café en plein air. Tandis que le limonadier, dans sa boutique de glace, vous vend la tasse de café cinq sous, de petits détailleurs tiennent, sous ces parasols chinois, une fontaine de fer-blanc, garnie d’un robinet, versent le café à la populace ; il est toujours au lait. Le porte-faix, le manouvrier, la femme de la halle, qui n’ont pas le temps de s’asseoir, le prennent debout. Les limonadiers, armés de leurs priviléges, vouloient châtier ces utiles détailleurs, ainsi que l’opéra châtie tous les chanteurs ; mais enfin la philosophie a tellement prévalu chez les hommes en place, qu’on a laissé le peuple déjeûner sous ses fardeaux, & boire, sans déplacement, son café à deux sous la tasse. C’est un beau & rare triomphe sur les priviléges exclusifs ; & je me plais à le consigner dans les annales de la liberté civile.

Nous avons des places publiques ; mais l’on ne s’y promène point. Il y a du gazon devant l’hôtel des invalides, devant la colonnade du louvre, au milieu du louvre ; mais défense de s’y asseoir & de s’y reposer.