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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IX, 1788.djvu/347

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de le soigner, de le caresser, de le voiturer, & de lui servir de femme-de-chambre, enfin de domestique.

Plusieurs gros chiens tombent, comme certains hommes, dans une détresse absolue ; car les chiens ont aussi leur destinée. Ils perdent leurs maîtres, & ils n’ont plus d’ordinaire réglé. Alors ils se mettent à étudier les savoirs des cuisines, & à bien graver dans leur tête l’heure à laquelle les cuisinières (qu’ils regardent d’un air compâtissant) jettent leur lavure. Quand ils ont pris possession de tel évier, ils écartent les autres chiens, s’emparent de tout ce qu’on jette, & sur-tout guètent les os à moëlle. Les auteurs infortunés se font parasites ; le gros chien flatte la servante ; le poète le financier. Tout profite au gros chien, parce qu’il n’a de dégoût pour rien ; il fait ventre de tout. Le poète affrontant les indigestions, en est quitte pour une ou deux par mois ; mais adoptant la politique du gros chien, il tâche d’écarter son confrère de la table où il s’assied.