Aller au contenu

Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VIII, 1783.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 292 )

le vers sur la scene n’est qu’un faux ornement qui tend à corrompre l’esprit, lorsqu’il faut être tout entier au sentiment & à l’image. Et la rime sera abandonnée aux chansons & aux vaudevilles, pour qui seuls elle semble faite.

Notez que tous ces rimeurs sont absolument dépourvus de toute invention ; ils sont incapables de faire un roman médiocre.

Or, je n’ai pas bonne opinion de tout auteur qui, dans sa jeunesse, n’a pas fait un roman ; il annonce par là même une sécheresse d’imagination & une sorte de stérilité, car pour former un roman, il faut de l’esprit, de l’usage du monde, la connoissance des passions, & les versificateurs, nivelant des mots, n’ont rien de tout cela.

Un écrivain qui n’a pas su faire un roman, me paroît n’être point entré dans la carriere des lettres par l’impulsion du génie. Ces ouvrages rimés reproduisent les mêmes tours, les mêmes idées ; & rien de plus rare qu’un auteur original. Tel qui n’a fait que de mauvaises tragédies, incapable de composer cent