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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VIII, 1783.djvu/59

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& le tems qui plonge dans l’oubli les productions défiles ou frivoles, me paroît le vrai, l’irrévocable journaliste. On ne revient point de ses jugemens ; il n’écoute ni la cabale ni les préventions ; il absorbe le livre dans son gouffre, ou le fait surnager sur l’abyme.

Pourquoi donc se dévouer à la haine de ses rivaux, & offenser l’amour-propre des hommes vivans, pour opérer ce que le tems doit faire mieux que tout autre ?

D’ailleurs l’invective est presqu’inséparable de la critique littéraire : on a beau choisir ses termes, on veut toujours dire que tel écrivain est un sot ou un ignorant. On verse le ridicule sur son œuvre ; & de là à sa personne il n’y a qu’un pas.

Les lettres faites pour répandre quelque charme sur la vie, ne doivent jamais être le prétexte de troubler le repos d’un galant homme, qui aura mal réussi en voulant instruire ou amuser les autres. Le critique le plus sage a encore quelquefois le foible de la jalousie ou de l’envie. Puis, quel est l’homme