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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome X, 1788.djvu/35

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Ta mère & moi, par exemple, nous nous étions beaucoup vus avant de nous marier. Eh bien ! elle m’a dit cent fois que je l’avois trompée ; je lui ai dit cent fois qu’elle m’avoit surpris. Tout cela s’est arrangé ; car il faut bien que cela s’arrange. — En vérité, mon père, voilà d’étranges maximes ! — Ce sont les maximes du monde, & le monde n’est pas un sot. Les petites gens ont besoin de s’aimer pour être heureux dans leur ménage ; mais pourvu que les gens riches vivent décemment ensemble, leur aisance les met d’accord. Allons, ma fille, de la résolution, du courage, de la gaieté, tout ira bien !

Le père sort après avoir prononcé ces mots. La fille, qui cache dans son sein une amoureuse foiblesse, écrit à son amant qu’on la marie malgré elle, mais que l’hymen lui rendra ce que l’usage lui ravit. Elle signe le contrat ; la noce n’est pas différée, & six semaines après elle a l’art d’installer son amant dans sa société. Celui qui s’en doute le moins, c’est le mari. S’il vouloit en parler,