REVUE DE LA QUINZAINE 3o& Quellemère plus malheureuse encore, ce mesemble, par ce qui manque à la pureté de ses regrets! » (Mmede Staël et son fils n’avaient jam ais beaucoup sympathisé, lui soldat, et soldatesque, elle intellectuelle, « tout esprit », comme on disait alors (i).) « J’espérais chaque jour quelques mots d’elle, qui me fissent au moins comprendre la nature de sa douleur. » L a « nature » d ’une douleur qui devait être ici, m algré les divergences de caractère, la chose la plus naturelle du monde : voilà bien le difficultueUx Mathieu de Montmorency, rejeton tardif et trop affiné d’une race millénaire. Et s’il en était ainsi dans un cas aussi simple, que devait-ce être dans des conjonctures beaucoup plus déli cates, qui ne manquèrent point, comme la liaison avec Benjamin Cons tant (oh! ce Benjamin Constant, comme le candide Mathieu de Mont morency l’aime peu!), comme les opinions politiques et philoso phiques de Mme de Staël, comme toute la tenue de sa vie, enfin ! Il faut vivement remercier M. P au l Gautier de nous avoir permis de lire ces curieuses lettres, qui intéressent au plus haut point l’historien, nous entendons l ’historien curieux non seulement de faits, mais de caractères et d’âmes. Une « âme », c ’est ce que fut Mathieu de Mont m orency, dans les conjonctures troublées de son temps, avec la noblesse et les inconvénients parfois un peu ridicules attachés à cette condition. Et c’ est ce qui apparaît dans cette correspondance, si curieuse aussi en ce qui concerne Mme de Staël. Les Filles publiques sous la Terreur, par Hector Fleisch- mann. — Voulant démontrer l ’intérêt de son sujet, l’auteur nous dit que le n égliger serait « dédaigner la source la plus merveilleuse des études pathologiques que peut mériter la Révolution; serait en lever à l ’examen d elà névrose terroriste la meilleure part de ses docu ments psychologiques... ». Sans partager absolument l’opinion de M. Hector Fleischmann (ce qu’il y eut surtout dans la « névrose terro riste », ce fut la peur; il est vrai que la peur pourrait se lier, sinon à l’amour, du moins à la débauche), on doit dire qu’il ne s’abuse pas tout à fait. Michelet,cité par lui, n ’a-t-il pas écrit que, pendant la Terreur, « la multiplication des filles, l ’énervation de l ’homme était un vrai fléau » ? Renan, dans VAbbesse de Jouarret n’a -t -il pas montré l’érotisme de cette société vivant sous le couteau? Mais nous ne suivrons pas M. Fleischmann quand il voit on ne sait quel rapport entre Pexacerbation érotique du Palais-Royal et la fièvre héroïque des frontières. Il se peut qu’il y ait là une obscure filiation psycho physiologique; qu’une fois de plus l’Amour soit « frère de la Mort ». Mais nous laisserons cela, imitant l’auteur lui-même, qui indique le problème et passe outre, pour donner surtout à son livre un intérêt de curiosité documentaire. Cet intérêt ne saurait se nier. Dans une (i) On connaît ses réprimandes, po:ir les grossièretés du jeune sabreur envers Schle^cl.
Page:Mercure de France, t. 76, n° 274, 16 novembre 1908.djvu/123
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