Page:Mercure de France, t. 77, n° 278, 16 janvier 1909.djvu/183

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REVUE DE LA QUINZAINE 375 § On noos objectera sans doute que cette dernière conception paraft être en désaccord avec les progrès rapides de l’aéroplane que nous avons nous-mêmes enregistrés au début de cet article. L ’aéroplane est loin des bonds de 100 mètres de long, à 6 mètres de hauteur, effec­ tués par Santos-Dumont, avec les 12^ kilomètres couverts parW right, ses volsà 117 mètres au-dessus de la terre, et le raid de Farman. On sera donc tenté d’en conclure : « Attendez. Nous n’assistons qu’aux débuts. On trouvera le moteur idcal et... mille autres choses. Com­ parez, non avec le ballon, mais avec l’automobile; et voyez quel che­ min a parcouru cette dernière depuis dix ans! » Il serait en effet puéril de nier qu’on 11e puisse apporter de multi­ ples perfectionnements dans la construction de l’aréoplane. M ais si nous admettons volontiers cette possibilité, cela ne suffit pas pour ruiner, ni même pour contredire notre affirmation que l’on marche vers une impasse. On y marche assez rapidement, et l’impasse sans doute est assez longue pour que l’on garde, quelque temps durant, l’impression de la liberté. Toutefois, plus les améliorations apportées à l’aéroplane se réaliseront rapidement, plus vite l’on atteindra le fâcheux mur du fond, soutenu par les longs mura de côté. Nous allons d’ailleurs traduire immédiatement ces métaphores en langage précis. Nous nous proposons en effet de démontrer que l ’aéroplane, en supposant acquis tous les desiderata actuellement formulés, meil­ leure utilisation des surfaces portantes, moteurs sans panne et plus légers encore, hélices parfaites, etc., ne pourra pas abolir ce que symbolisent ces murailles infranchissables, parce que, à l’exemple du ballon sphérique, le principe même qui lui a donné naissance et lui perm et de vivre est précisément ce qui constitue cette impasse. En d’autres termes, il est, comme le sphérique, étroitement limité dans son développement par ses propres conditions d’existence. Ce n’est donc pas sans dessein que nous avons évoqué plus haut les premières ascensions. Ce n’est pas non plus seulement pour rap­ procher les enthousiasmes pareils qui saluèrent l’essor initial de la montgolfière et de l’aéroplane, témoignant de l’éternel désir des fou­ les d ’un affranchissement, sans cesse différé par le mauvais vouloir de quelques-uns, l’ignorance des autres, et surtout la stupidité du plus grand nombre, il y a, contrairement au dicton, une raison à cette comparaison. On sait que le principe qui permet au ballon de s’élever fui interdit également d’arriver jamais à l’équilibre parfait entre sa pression intérieure et la pression extérieure; il en résulte qu ’il est obligé, à une certaine hauteur et sous peine d’explosion, de laisser s’échapper du gaz, ce qui le conduit à redescendre. A ce mo­ m ent il jette du lest, remonte, et ainsi de suite, contraint en consé­