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Page:Mercure de France - 1766-02.djvu/19

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devoirs, lui trouvèrent encore quelques ſignes de vies, en prirent ſoin, & en peu de jours le mirent hors de danger. Il n’eut pas plutôt recouvré la connoiſſance & la parole, qu’il s’informa, de ſa chère Erippe. On ne put long-temps lui céler la vérité : il fallut lui avouër que les Gaulois l’avoient emmenée. On peut juger de la mortelle douleur que lui cauſa cette perte. Il fit des efforts extraordinaires pour y réſiſter, ne ſongea qu’à faire une ſomme conſidérable pour ſa rançon, & à l’aller chercher en Gaule.

    Lorſqu’il apprit cette nouvelle,
    Il crut bien en avoir dans l’aîle,
    Et ne doutoit pas que ſon front
    N’en eût reſſenti quelque affront.
    Sa femme étoit & jeune & belle,
    C’étoit aſſez pour troubler la cervelle
    À qui l’auroit bien meilleure que lui :
Mais pour ne ſuccomber à ce mortel ennui,
  Il ſait combien l’or peut lever d’obſtacles,
  Et de tout temps produiſit de miracles.

En partant de cette idée, le bon époux vendit du bien & pluſieurs meubles, emprunta chez tous ſes amis, & fit une aſſez bonne ſomme avec laquelle il ſe mit en chenîin. Il traverſa l’Italie où il étoit