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Page:Mercure de France - 1891 - Tome 2.djvu/96

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FÉVRIER 1891

Elle mourut en envoyant de longs baisers Cueillis au miel de ses désirs inapaisés Montés à ses lèvres décloses et le ciel fut jonché d’une moisson de roses longtemps par les monts et les routés Le bon Roi chevaucha sans que le moindre écueil Heurtât son rude orgueil. Les ennemis ne purent compter leur déroutes Maintes bastilles, maints châteaux, Qui se dressaient farouchement sur son passage furent pris et mis au pillage Et leurs défenseurs pendes aux créneaux Il traversa les mers où chantent les Sirènes, Et les bois peuplés d’oiseaux fabuleux, Il traversa les mers et les bois et les plaines Sous des ciels noirs, sous des ciels blancs, sous des ciels bleus. Aux soirs de lassitude et de lourdes tristesses des femmes au sourire ensorceleur Tendaient leurs mains dispensatrices des caresses pour énamourer son cœur, Son coeur aride et tel que les citernes vides. Elles semaient sur le chemin des fleurs perfides. Dont les pistils fumaient comme des encensoirs. Dans l'air tiède des soirs Mais le héros, drapé dans son orgueil farouche d’un geste abolissait les charmes corrupteurs Et le male artifice des femmes, des fleurs,Sans même tenter l' escarmouche.Car des jardins d’amour, volontaire banni, Il allait méprisant les voluptés coupables. Dédaigneux comme un dieu des sanglots d’infini qui convulsaient les choses périssables pendant des jours, des jours et des années vers le sacre promis, il marcha sans faiblir Il vit ses blonds cheveux blanchiret ses désirs tomber comme des fleurs fanées il vit s’user ses forces, s’éteindre ses yeux, Ses compagnons mourir en rudes agonies.