Page:Mercure de France - 1899 - Tome 29.djvu/149

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pour ma propre part, je ne puis croire que ces récentes périodes de timides expérimentations, de théories fragmentaires et de discorde mutuelle soient le point culminant où doive atteindre l’homme. Je dis : pour ma propre part. Lui, je le sais, — car la question avait été débattue entre nous longtemps avant qu’il inventât sa Machine — avait des idées décourageantes sur le Progrès de l’Humanité, et il ne voyait dans les successives transformations de la civilisation qu’un entassement absurde destiné, à la fin, à retomber inévitablement sur ceux qui travaillaient à les détruire. S’il en est ainsi, il nous reste de vivre comme s’il en était autrement. Mais pour moi, l’avenir est encore obscur et vide ; il est une vaste ignorance, éclairée, à quelques endroits accidentels, par le souvenir de son récit. Et j’ai conservé, pour mon réconfort, deux étranges fleurs blanches, — recroquevillées maintenant, brunies, sèches et fragiles — pour témoigner que lorsque l’intelligence et la force eurent disparu, la gratitude et une tendresse mutuelle survécurent encore dans le cœur de l’homme.

H.-G. Wells.

(Traduit de l’anglais par Henry-D. Davray.)