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Page:Mercure de France - 1899 - Tome 32.djvu/109

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mercvre de france—x-1899


L’ŒUF DE CRISTAL



L’année dernière encore, il y avait, non loin des Sept Cadrans, une petite boutique, d’aspect rébarbatif, sur laquelle était peinte, en lettres jaunes à demi effacées, l’enseigne : C. Cave, naturaliste et marchand d’antiquités. Le contenu des vitrines était curieusement varié. Elles renfermaient des défenses d’éléphant, un jeu d’échecs incomplet, des verroteries, des armes, une boîte d’yeux, deux crânes de tigre, un crâne humain, plusieurs singes — l’un d’eux tenant une lampe — empaillés et mangés des vers, de vieux meubles démodés, un œuf d’autruche piqué des mouches, des engins de pêche, un aquarium de verre extraordinairement sale et vide. Il y avait aussi, au moment où cette histoire commence, une masse de cristal façonnée en forme d’œuf et merveilleusement polie. Cet œuf, deux personnes arrêtées devant la vitrine l’examinaient : l’une, un clergyman grand et maigre ; l’autre, un jeune homme à la barbe très noire, au teint basané et de mise discrète. Le jeune homme basané parlait en gesticulant avec vivacité et semblait fort désireux de voir son compagnon acheter l’article.

Pendant ce temps, M. Cave sortit de son arrière-boutique, mâchonnant encore un reste du pain beurré de son thé. Quand il aperçut les deux hommes et l’objet de leur attention, il perdit contenance. Lançant un regard furtif par-dessus son