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Page:Mercure de France - 1899 - Tome 32.djvu/112

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l’œuf de cristal

affirma son droit de conduire ses affaires comme il l’entendait. Une altercation s’en suivit. Les deux clients observèrent la scène avec intérêt et amusement, secourant à l’occasion Madame Cave par des questions et des suggestions. M. Cave, fort malmené, persista dans son impossible et confuse histoire d’un client venu dans la matinée, et son agitation devint pénible. Mais il s’entêta malgré tout avec une extraordinaire obstination. Ce fut le jeune Oriental qui mit fin à cette curieuse controverse. Il proposa de revenir dans deux jours — afin de donner au prétendu client la chance de quelque délai pour se décider.

— Et alors, dit le clergyman, nous insisterons… Cinq guinées !

Madame Cave prit sur elle d’excuser son mari, expliquant qu’il était parfois un peu bizarre, et les deux clients laissèrent le couple continuer la dispute.

Aussitôt qu’ils furent seuls, Madame Cave interpella son mari avec une singulière autorité. Le pauvre petit homme, tremblant d’émotion, barbota dans ses histoires, affirmant d’un côté qu’il avait un autre acheteur en vue, et de l’autre assurant que l’œuf de cristal valait certainement quinze guinées.

— Alors, pourquoi n’en avez-vous demandé que cinq ?

— Ah ! ça, voulez-vous me laisser faire mes affaires comme je l’entends, à la fin ! conclut M. Cave.

M. Cave avait un beau-fils et une belle-fille qui vivaient avec lui, et le soir, au dîner, la transaction manquée fut remise en discussion. Aucun d’eux n’avait une haute opinion des méthodes commer-