Aller au contenu

Page:Mercure de France - 1899 - Tome 32.djvu/124

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
125
l’œuf de cristal

éventail couvert de joyaux, et une figure, ou plutôt la partie supérieure d’une figure avec de larges yeux s’approcha pour ainsi dire contre la sienne, comme si elle se fût trouvée de l’autre côté de l’œuf de cristal. M. Cave fut si effrayé et si frappé de l’absolue réalité de ces yeux, qu’il fit un brusque mouvement de la tête pour regarder derrière le cristal. Il s’était tellement absorbé dans sa contemplation qu’il fut très surpris de se retrouver dans la fraîche obscurité de sa petite boutique avec son odeur familière de méthol, de moisi et de renfermé. Et pendant qu’il clignotait des yeux, la clarté du cristal s’affaiblit et s’éteignit.

Telles furent les premières impressions générales de M. Cave. L’histoire en est curieusement positive et circonstanciée. Dès le début, lorsque la vallée apparut d’abord momentanément à ses sens, son imagination fut étrangement frappée, et, quand il commença à apprécier les détails de la scène qu’il voyait, son émerveillement devint une curiosité passionnée. Il vaquait à ses affaires insouciant et distrait, ne pensant qu’au moment où il pourrait retourner à sa contemplation. C’est alors que, quelques semaines après sa première vision, vinrent les deux clients, le tourment et l’émotion que causa leur offre, la façon dont l’œuf de cristal l’avait échappé belle, et tous les événements déjà racontés.

Tant que la chose fut le secret de M. Cave, l’œuf de cristal resta simplement un prodige, qu’on va voir et admirer clandestinement à la façon dont un enfant explore un jardin défendu. Mais M. Wace possède, en sa qualité de jeune savant investigateur, des habitudes d’esprit particulièrement lucides et logiques. Aussitôt que l’œuf de cristal et son histoire lui parvinrent, et qu’il fut certain, après