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la guerre des mondes

entre des saules argentés au feuillage immobile sous le chaud soleil.

— Les soldats les arrêteront bien, dit une femme, d’un ton peu rassuré.

Une brume monta au-dessus des arbres. Puis soudain nous vîmes un énorme flot de fumée qui envahit rapidement le ciel ; au même moment, le sol trembla sous nos pieds et une explosion immense secoua l’atmosphère, brisant les vitres des maisons proches et nous plongeant dans la stupéfaction.

— Les voilà ! cria un homme vêtu d’un jersey bleu. Là-bas ! Les voyez-vous ? Là-bas !

Rapidement, l’un après l’autre, parurent deux, trois, puis quatre Marsiens, bien loin par-delà les arbres bas, à travers les prés s’étendant jusqu’à Chertsey, et ils se dirigeaient avec d’énormes enjambées vers la rivière. Ils parurent être, d’abord, de petites formes encapuchonnées, s’avançant à une allure aussi rapide que le vol des oiseaux.

Puis, arrivant obliquement dans notre direction, un cinquième monstre parut. Leur masse cuirassée scintillait au soleil, tandis qu’ils accouraient vers les pièces d’artillerie, et ils paraissaient de plus en plus grands à mesure qu’ils approchaient. L’un d’eux, le plus éloigné vers la gauche, brandissait aussi haut qu’il pouvait une sorte d’immense étui, et ce terrible et sinistre Rayon Ardent, que j’avais vu à l’œuvre le vendredi soir, jaillit soudain dans la direction de Chertsey et attaqua la ville.

À la vue de ces étranges, rapides et terribles créatures, la foule qui se pressait sur les rives sembla un instant frappée d’horreur. Il n’y eut pas un mot, pas un cri — mais le silence. Puis un rauque murmure, une poussée — et l’éclaboussement de l’eau. Un homme, trop effrayé pour poser la malle