Page:Mercure de France - 1900 - Tome 33.djvu/418

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ment étincelant, qui était le Marsien, actionnant et contrôlant les mouvements de ses membres multiples au moyen de ses délicats tentacules, et semblant être, simplement, l’équivalent de la partie cérébrale du crabe. Je perçus alors la ressemblance de son tégument gris-brun, brillant, ayant l’aspect du cuir, avec celui des autres corps rampants environnants, et la véritable nature de cet adroit ouvrier m’apparut sous son vrai jour. Après cette découverte, mon intérêt se porta vers les autres créatures — les Marsiens réels. J’avais eu d’eux, déjà, une impression passagère, et la nausée que j’avais ressentie alors ne revint pas troubler mon observation. D’ailleurs, j’étais bien caché et immobile sans aucune nécessité de bouger.

Je voyais maintenant que c’étaient les créatures les moins terrestres qu’il soit possible de concevoir. Ils étaient formés d’un grand corps rond, ou plutôt d’une grande tête ronde d’environ quatre pieds de diamètre et pourvue d’une figure. Cette face n’avait pas de narines — à vrai dire les Marsiens ne semblent pas avoir été doués d’odorat — mais possédait deux grands yeux sombres, immédiatement au-dessous desquels se trouvait une sorte de bec cartilagineux. Derrière cette tête ou ce corps — car je ne sais vraiment lequel de ces deux termes employer — était une seule surface tympanique tendue, qu’on a su depuis être anatomiquement une oreille, encore qu’elle dût leur être presque entièrement inutile dans notre atmosphère trop dense. En groupe autour de la bouche, seize tentacules minces, presque des lanières, étaient disposés en deux faisceaux de huit chacun. Depuis lors, avec assez de justesse, le professeur Stowes, le distingué anatomiste, a nommé ces deux faisceaux des mains. La première