Page:Mercure de France - 1900 - Tome 33.djvu/684

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social, il propose à des races d’une haute maturité intellectuelle, en France ou en Italie par exemple, un mensonge grossier et mal apprêté qui ne saurait avoir de prise sur elles.

Moins dangereux pour l’énergie sociale dans les pays de race protestante, il est ici plus spécialement un péril pour l’esprit. Car, se confondant, par son enseignement moral, avec la religion et la coutume ancienne, et sous couleur d’interpréter dans un sens plus libéral la religion et la coutume, il retient en ces modes du passé quelques intelligences dont une rigueur plus stricte eût aiguisé l’impatience, leur communiquant l’élan nécessaire pour bondir, par delà les fictions anciennes, dans la région de l’esprit scientifique.

On veut croire ici que la régression religieuse dont le rationalisme, sous les formes, souvent, de la libre pensée, menace encore de retarder le cours de l’évolution intellectuelle, sera enrayée. A côté de l’admirable lignée de savants qui ont été, en notre pays et en des nations voisines, l’honneur de la pensée humaine au cours de ce siècle, l’œuvre géniale d’un Frédéric Nietzsche est aussi un symptôme d’heureux augure. Cette œuvre manifeste que le rationalisme a plus de prise sur les races protestantes et menace leur plus haut développement, ces races produisent des esprits assez vigoureux pour opposer au mal une violence proportionnée à sa force. A la fin de ces pages consacrées entièrement à analyser les symptômes de ce mal rationaliste qui guette les débiles à l’issue de la religion et de la coutume, on propose l’œuvre de Nietzsche comme le contre-poison le plus efficace à opposer à une éducation bassement sentimentale de la raison, comme le sel le plus propre à purifier