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Page:Meredith - L’Égoïste, 1904.djvu/139

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L’ÉGOÏSTE

Willoughby comme les ladies Éléonore et Isabelle, il acquiesçait par une syllabe ou restait silencieux. Il ne discutait jamais avec âpreté. Le poids de la maison, avec sa chape de fer, était sur lui ; comme il était sur les domestiques, comme — ô terreur des naufragés qui voient l’abîme prêt à les engloutir — il serait sur l’épouse.

— Quand verrai-je Miss Dale ? s’informa-t-elle.

— Ce soir même, au dîner, répondit Sir Willoughby.

Bien, pensa-t-elle. Voilà de quoi prévoir l’avenir.

Elle s’accommoda de son humeur morose et souhaita de vivre au moins jusqu’à ce qu’elle eût vu Miss Dale, et bien avant l’heure, son espoir s’était évanoui de rencontrer une autre qu’une esclave hébétée de Sir Willoughby. Ainsi, elle fut en torpeur les deux ou trois premières minutes qu’elle se trouva seule avec Lætitia dans le salon, avant que les dames se fussent réunies.

— Miss Middleton ? dit Lætitia en s’avançant vers elle. Ma jalousie me le dit, car vous avez conquis le cœur de mon petit Crossjay, et vous avez plus fait en quelques minutes pour le rendre docile que nous n’avons pu faire en plusieurs mois.

— Il m’a fait grand plaisir en m’apportant des fleurs ! dit Clara.

— Il fut très discret. Je le dis, parce que généralement les garçons de son âge nous jettent brutalement leurs dons à la figure. Tandis qu’il y mit des manières avec vous.