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Page:Meredith - L’Égoïste, 1904.djvu/167

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L’ÉGOÏSTE

il faudra donc que je coure le risque de me remarier. Il le faudra bien. Car elle m’a si bien habitué aux petites attentions des femmes ! Il faut la sauver ». Et l’époux fervent de n’importe quelle femme serviable se tordait les mains.

— Et voilà l’Égoïste ! ajoutait Sir Willoughby. Ceci est le parfait égoïste. Pauvre homme ! Pauvre femme ! Il ne se doutait pas de son grossier égoïsme.

— Un égoïste, répétait Clara.

— Gardez-vous de vous marier avec un égoïste ! Il s’inclinait galamment ; et elle le vit si aveuglément fat, qu’elle eut de la peine à croire qu’il se fût rendu coupable d’avoir dit ce qu’elle venait d’entendre. Elle tenait ses yeux obstinément fixés sur lui, jusqu’à ce que ses pensées se brouillassent en même temps que sa vue. Elle jetait les yeux sur Vernon, sur son père, sur les ladies Éléonore et Isabelle. Personne ne voyait l’homme dans le mot qu’il avait prononcé ; personne n’avait fait attention au mot ; pourtant ce mot, c’était sa panacée, à elle, la lampe qui faisait la lumière dans son esprit ; c’était la clef qui lui permettait de pénétrer dans le tréfonds de l’homme {et hélas ! elle y pensait en ressentant la nécessité), c’était encore l’avocat qui plaidait la cause de la fiancée. Égoïste | Elle le contemplait — l’infortuné par lui-même étiqueté — elle l’étudiait en ses bonnes qualités et dans ses défauts sous la lueur de l’implacable lampe, et ce qu’il y avait de bon en lui, apparut saturé de sa première personne au singulier. Sa générosité clamait