Aller au contenu

Page:Meredith - L’Égoïste, 1904.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
6
L’ÉGOÏSTE

comme gentleman de notre temps et de ce pays, riche et établi ; une figure non flexible, quoi que nous puissions faire, dont l’humour à peine égaie la surface, et ne se peut discerner que par les plus perspicaces ; lutins très vicieux, dont la vertu de rugir tout bas à quelque imperceptible révélation de sa qualité, ont d’abord éveillé l’attention des doux anges littéraires sur ce quelque chose de comique en lui ; quand ils furent, un et tous, près de décrire le gentleman nûment en tête des chroniques ( la brièveté est un compliment), comme étant un gentleman de famille et propriétaire, une idole de cette île pompeuse qui admire le concret.

Par leur fantasque malignité les lutins favorisent la vision ; vicieusement ils aiment à dévoiler le ridicule des figures imposantes.

Partout où ils décèlent l’Égoïsme, ils plantent leur camp, creusent les tranchées, établissent les circonvallations, garnissent leurs lanternes, sûrs d’un gain à venir, si assurés, que lorsqu’ils ont jeté leur dévolu sur un gentleman anglais, leur proie convoitée, ils ne la lâchent plus. Peu à peu ils l’amènent à badiner, à s’ériger en grotesque, à son insu, et il sort du brouillard natal leur fumet de chasse. À l’instant ils se mettent à l’œuvre, gentleman et lutins. C’est la fondation d’une grande maison qui durera des siècles, ils seront là qui noteront la naissance de chaque héritier. Et quand il naîtra, ils élèveront les mains en signe de joie, car ils auront reconnu dans cet enfan-