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Page:Meredith - Les Comédiens tragiques, 1926.djvu/140

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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

jugeait trop redoutable ; il n’était mi l’amant qu’il se croyait, ni le maître des hommes qu’elle avait cru.

Dans son découragement profond, Clotilde ne put supporter la vue d’un des portraits d’Alvan ou d’un souvenir quelconque qui le lui rappelât. Celui qui eût dû être près d’elle était parti et ne pouvait la défendre contre les assauts terribles qui la laissaient presque sans vie. Elle se sentait abandonnée, et faute d’imagination, crut qu’il ne lui restait plus rien à faire qu’à retomber sur les siens. Elle fit sa soumission à sa mère. Dans la lutte suprême contre une faiblesse qui parlait tour à tour au nom de son amour ou de sa lâcheté, elle interpréta ainsi sa défaite : « Il peut venir ; s’il vient, en effet, je serai à lui ; sinon, c’est aux miens que je me dois. »

Il lui avait appris à compter aveuglément sur lui, et elle lui obéissait passivement jusqu’à se libérer de lui. C’est la même confiance qui pousse le croyant à promettre au saint sa foi s’il veut seulement se manifester. Clotilde, en tout cas, se soumit. D’où grande joie dans la famille, dont elle goûta les caresses.