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Page:Meredith - Les Comédiens tragiques, 1926.djvu/160

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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

XI

L’histoire du départ de Clotilde n’était pas mieux fondée que le récit de la femme de chambre touchant l’éloignement d’Alvan. C’était une anticipation sur la vérité, machinée par les Rüdiger. En réalité, on éloigna Clotilde le jour où l’armée des espions et des messagers secrets mise sur pied par Alvan dut une dignité nouvelle à l’adjonction d’hommes de loi prêts à prendre la tête des troupes d’assaut.

Clotilde, qui voyait dans ce déplacement une chance de libération, partit sans résistance. Aller sur les routes, voir des visages, cela suffisait à ranimer ses espoirs. Elle avait obtenu la paix nécessaire, et son cœur s’agitait en un nouvel éveil, plus voluptueux d’abord que pénible. Elle était tombée trop bas ; Alvan était trop loin ; elle ne pouvait s’attendre à le revoir lui-même, mais à tous ceux qui l’approchaient elle supposait des déguisements étrangers ; les hommes étaient des domestiques envoyés par Alvan, les blouses cachaient des gentlemen. Elle regardait avec insistance les vieilles paysannes, s’attendant à voir le fruit défendu sortir de leur panier sous forme d’une enveloppe. Mais