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Page:Meredith - Les Comédiens tragiques, 1926.djvu/228

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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

XVII

La baronne attendait, ce matin-là, Alvan qui avait annoncé sa venue et observait toujours une stricte exactitude. Elle se sentait, en ce qui concernait Clotilde, étrangère à tout sentiment égoïste ; la fureur de passion d’Alvan l’empêchait de formuler un de ces vœux que, libérés ou non de toute superstition, nous adressons au destin quand se trouvent en suspens des décisions qui nous touchent. Elle pressentait que Clotilde accorderait l’entrevue et ne manquerait pas de céder dès qu’elle se trouverait en présence de son maître ; et alors, adieu à la gloire d’Alvan ! Quant à l’autre alternative, elle songeait, en se souvenant de la frénésie que trahissaient chez Alvan paroles et regards, qu’il n’en pouvait résulter qu’une explosion de révolte et de fureurs infernales. Il était tout anges et démons. Les anges avaient eu longtemps le dessus, mais les démons n’étaient pas morts. Sa passion pour une fille médiocre vouait Alvan à leur troupe immonde. Contrariée, désespérée, elle ne se laisserait sans doute pas arrêter par les barrières légales. Une fertile cervelle de légiste est merveilleusement armée pour combattre la loi : il lirait,