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Page:Meredith - Les Comédiens tragiques, 1926.djvu/230

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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

dès leur première rencontre. C’en est assez parfois pour inspirer un semblant de courage : Clotilde saurait peut-être prendre une décision et s’y tenir assez longtemps pour permettre à Alvan de préparer un enlèvement. Et les sorcières du Brocken le féliciteraient de sa conquête.

— Mieux vaudrait presque, songeait la baronne, que les circonstances le contrarient et déchaînent en lui l’élément démoniaque.

Le matin, le milieu du jour et l’après-midi passèrent.

Tard dans la soirée, la porte s’ouvrit grande devant le colonel de Tresten.

Le visage de la baronne refléta son interrogation :

— Eh bien ?

Tresten n’avait pas l’habitude de laisser lire sur ses traits le cours de ses pensées.

— Comment cela s’est-il passé ? interrogea-t-elle.

— Comme je l’avais prédit. Je crois avoir assez bien jaugé la donzelle.

— Elle refuse de le voir ?

— Bien entendu.

— Et Alvan ?

Le colonel haussa les épaules. Ce geste ne visait pas à taquiner une femme parfaitement calme, mais à exprimer la conséquence inévitable de ce refus : une explosion de l’Etna. La baronne en jugea comme lui.

— Où est-il, pour l’instant ? reprit-elle.

— À son hôtel.

— Seul ?

— Leczel est avec lui.

— Voilà qui sent la guerre.