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Page:Meredith - Les Comédiens tragiques, 1926.djvu/252

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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

XIX

Alvan était mort. Dirigé par le hasard, le coup de son adversaire l’avait mortellement frappé. Il mourut au matin du troisième jour. On n’avait eu, dès le début, aucun espoir de le sauver, et ses atroces souffrances faisaient appeler une issue rapide par ceux qui auraient le plus ardemment souhaité le voir vivre.

La baronne avait été mandée en hâte près de lui dès qu’il était sorti de sa première syncope. Elle le soigna jusqu’à la fin et, toute à son rôle, reçut sans une larme ses dernières confidences. La mort seule libéra la main qu’il tenait dans la sienne. Il accueillit son destin en vaillant qu’il était. Si les affres et les tortures physiques de l’agonie avaient laissé plus de liberté à sa pensée, il aurait pu, lui aussi, s’étonner de l’ironie du sort et de l’étrange destin qui faisait, au nom d’une fille sans fond, tomber un homme comme lui sous le coup d’un enfant ! Il aurait pu adresser à la vie quelque raillerie suprême et goûter le triste parfum de cet adieu : c’est ainsi que nous nous résignons, quand le poids trop lourd de nos prétentions a fait sombrer