Page:Merrill - Poèmes, 1887-1897, 1897.djvu/221

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LA VILLE MORIBONDE

à Edmond Pilon.

C’est la Ville malade et lasse comme une mère,
Qui dort d’un lourd sommeil au bord d’un fleuve de mort.
Tant de ses fils, jadis, casqués d’ailes de chimère,
Sont partis, poings crispés à leur bannière éphémère,
Qu’elle a peur, ce soir-ci, des souvenirs du sort.

Aussi dort-elle, au son monotone de ses cloches,
Auprès du pont de pierre où nul voyageur ne va
Plus. Et tous ses chemins qui mènent, par bois et roches,
Avec des croix de fer aux bornes, vers les champs proches,
Sont déserts, car bientôt l’Effroi va passer là.