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LA PHILOSOPHIE DE LA MATIÈRE

peut être, il est susceptible d’en prendre une nouvelle dose, si on le distille sur des oxydes métalliques, tels que l’oxyde de manganèse, l’oxyde de plomb ou l’oxyde de mercure : l’acide qui se forme alors et que nous nommons acide muriatique oxygéné, ne peut exister comme le précédent, lorsqu’il est libre que dans l’état gazeux ; il n’est plus susceptible d’être absorbé par l’eau en aussi grande quantité… L’acide muriatique oxygéné est susceptible comme l’a démontré M. Berthollet, de se combiner avec un grand nombre de bases salifiables ; les sels qu’il forme sont susceptibles de détoner avec le carbone et avec plusieurs substances métalliques : ces détonations sont d’autant plus dangereuses, que l’oxygène entre dans la composition du muriate oxygéné avec une très grande quantité de calorique qui donne lieu par son expansion à des explosions très dangereuses. »[1].

Ajoutons en passant que lorsque Gay Lussac et Thénard, voyant qu’il était impossible d’isoler l’oxygène de l’acide muriatique oxygéné émirent enfin l’hypothèse que le soi-disant acide muriatique oxygéné pourrait être un corps simple, ils acceptèrent avec une certaine mauvaise humeur cette manière de voir à laquelle ils espéraient échapper afin de sauver la doctrine substantialiste considérant l’oxygène comme principe acidifiant ; reprenant l’hypothèse abandonnée par les chimistes français, Davy établit alors que l’acide muriatique (ou chlorhydrique) ne contient pas d’oxygène et que contrairement à la conviction intime de Lavoisier, le principe oxygène n’est pas porteur d’acidité.


Enfin, et pour Lavoisier déjà, si le principe oxygène est bien le principe acidifiant, il n’est cependant pas que le principe acidifiant ; en se combinant sans les saturer entièrement avec certains métaux, il forme des composés différents que les anciens nominaient chaux et auxquels la nouvelle école propose d’appliquer le nom générique d’oxydes. « Les substances métalliques, en s’oxygénant dans l’air dit Lavoisier, ne se convertissent pas en acides comme le soufre, le phosphore et le charbon : il se forme des substances intermédiaires, qui commencent à se rapprocher de l’état salin, mais qui n’ont pas encore acquis toutes les propriétés salines »… Lorsque les métaux forment différents oxydes, nous pouvons les distinguer les uns des

  1. Vol. I, p. 257.