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CONCEPTS FONDÉS SUR LA RESSEMBLANCE

tions anciennes, chez les primitifs même, qui n’ont pas encore de véritable science, l’analogie entre les différentes choses appartenant au même groupe sera souvent purement mystique ; dans les cas les plus frappants elle ne sera pas apparente pour l’homme ordinaire, mais sera conditionnée par la sorcellerie ou la magie que l’initié seul saura déceler.

Ne voyons-nous pas que, pour les sauvages, cette analogie agissante se réduit à une identité simultanément partielle et complète entre choses apparemment très différentes. Chez eux, a écrit M. Lévy Bruhl, « les objets, les êtres, les phénomènes peuvent être, d’une façon incompréhensible pour nous, à la fois eux-mêmes et autre chose qu’eux-mêmes ». Ainsi les Trumaï[1] disent qu’ils sont des animaux aquatiques ; les Bororo se vantent d’être des perroquets rouges ; et les affirmations de ces hommes ne sont aucunement métaphoriques ; ils savent qu’ils sont humains et en même temps poissons ou perroquets, sans juger qu’il y ait contradiction entre ces états hétérogènes. Mais cette conception étrange n’est aucunement statique ou contemplative. Les objets auxquels elle s’applique, et d’une manière « non moins incompréhensible, émettent et reçoivent des forces, des vertus, des qualités, des actions mystiques qui se font sentir hors d’eux sans cesser d’être oh ils sont ». Ainsi « l’indien, à la chasse ou à la guerre, est heureux ou malheureux, selon que sa femme restée dans son campement s’abstient ou non de tels ou tels aliments, ou de tels ou tels actes ». « L’enfant nouveau-né subit le contre-coup de tout ce que fait son père, de ce qu’il mange, etc. »

Nous ne pouvons songer à reproduire ici les exem-

  1. Tribus du Nord du Brésil. — Voir les fonctions mentales chez les sociétés inférieures, p. 77.